L'appropriation en hypnose




Il est généralement admis qu'une personne entrainée à produire des phénomènes, sera capable de les solliciter plus facilement qu'un novice. On pourrait même se dire, qu'à force d'entrainement, un certain degré d'appropriation devrait se manifester chez la personne, et qu'elle devrait faire sien les phénomènes produits...

Pourtant, dans un des ses articles intitulé "
Laboratory and Clinical Hypnosis: The Same or Different Phenomena?" (Collected Papers - Volume II), Milton Erickson va témoigner de comportements très intéressants.

Le premier va concerner un athlète qui s'est coupé la langue suite à un saut. Cette personne était un sujet entrainé à produire tout un tas de phénomènes, dont des anesthésies, dans un contexte expérimental, en laboratoire. Lors de son accident, il souhaita être traité par Erickson en priorité. Suite à cette évènement, il rapportera le témoignage suivant :

"Ce que vous avez fait pour moi est exactement la même chose que ce que nous avions fait au laboratoire sauf que c'était différent.

Au laboratoire, j'acceptais les suggestions et je les mettais en œuvre minutieusement. J'ai déjà subi une anesthésie. C'était aussi efficace que l'anesthésie que vous avez produite dans ma langue. Mais l'anesthésie de laboratoire, aussi réelle soit-elle, appartenait au laboratoire. Cela fait partie d'une étude scientifique.

Ce que vous avez fait pour moi était aussi réel que n'importe quelle anesthésie hypnotique que j'ai jamais eue en laboratoire. Mais c'était à moi, tout à moi - même si vous y avez participé - c'était à moi.

Peut-être que je peux le dire de cette façon. Je suis étudiant. Je suis membre du corps étudiant. L'identité physique est la même. Les significations sont différentes. L'hypnose en laboratoire et l'hypnose personnelle peuvent vous donner des résultats similaires. Mais ils sont différents pour une personne"

Erickson obtiendra un autre témoignage similaire d'un autre étudiant auquel il apportera son aide suite à une blessure :


"En réfléchissant à l'hypnose que vous avez fait pour ma cheville, je dirais qu'elle était aussi efficace et réelle que n'importe quelle expérience de laboratoire. Mais elle était différente d'une certaine manière.

L'hypnose au laboratoire vous appartenait, à vous, à moi, au département de psychologie de la science. L'hypnose de mon entorse, toute l'hypnose que vous avez utilisée pour la douleur m'appartenait en quelque sorte. La meilleure façon dont je puisse le dire est: tout comme l'entorse de la cheville était à moi, l'hypnose l'était aussi. Cela aussi était tout à moi. L'hypnose en laboratoire et l'hypnose personnelle peuvent donner les mêmes résultats, mais leur signification personnelle est différente."


Erickson fera d'ailleurs une autre remarque très intéressante sur ce sujet :

"Contrairement aux récits ci-dessus, il existe un autre type de constat. Au fil des ans, de nombreux excellents sujets de laboratoire ayant parfaitement démontré les phénomènes de l'hypnose et ayant apparemment soutenu de tels recherches, ont été jugés réticents, réellement incapables ou peut-être seulement partiellement capables d'utiliser l'hypnose lorsqu'elle impliquait des besoins personnels."

Il conclura cet article par une mise en garde :

"Ce sont des études qui devraient être lues avec le plus grand soin par quiconque entreprend une hypnose de laboratoire ou clinique, car elles sont indicatives du stress qu'une personne à l'état de veille subira et par conséquent, par déduction, démontrant que les situations, les motivations, l'obéissance et les facteurs de personnalité sont très significatifs dans le comportement et les réponses d'un être humain, d'une manière qui n'est pas encore comprise dans l'état de veille d'un sujet, encore moins dans des états hypnotiques ou d'autres états de conscience altérée.

Posts les plus consultés de ce blog

La theorie de la Néodissociation d' Ernest Hilgard

Les zones hypnogènes

Erickson et le mythe des métaphores